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vendredi 4 septembre 2020

Archéologie ferroviaire de Dinan à La Brohinière

 

Etablie sur la ligne Ouest Lison / Lamballe, Dinan fut gare de bifurcation vers Dinard, comme nous le verrons prochainement. Mais Dinard n'était pas la seule voie unique embranchée à Dinan, devenue aujourd'hui une voie verte destinée à la promenade et à la randonnée pédestre ou cycliste. Tracée en direction du sud, une seconde ligne  - qui n'était en fait que la prolongation de la première - menait à La Brohinière, gare établie sur l'artère Paris/ Brest. C'est cette ligne de La Brohinière dont je vais vous parler aujourd'hui.

Longue de 38,4 km, la ligne La Brohinière/ Dinan est ouverte en 1896 dans le cadre du plan Freycinet. Le service des voyageurs est supprimé en 1939. Celui-ci avait une particularité qui va ravir les modélistes : les trois trains quotidiens (MV et omnibus) mis en service dans chaque sens étaient, lors de la création de la SNCF, confiés aux locomotives à vapeur 3-230 E (ex-Etat 230-900), machines à petites roues d'origine saxonne reproduites en H0 comme en N !

Beaucoup de petites lignes de la SNCF ont été progressivement découpées, après la Seconde Guerre mondiale, en plusieurs tronçons avec desserte, souvent assurée par un locotracteur, depuis une gare-centre. Tel fut le sort de la ligne La Brohinière / Dinan, coupée en deux dès les années 1950 : La Brohinière / Le Quiou-Evran (20 km) au sud et Tréveron/ Dinan (18 km) au nord. 

C'est depuis Dinan que nous commençons notre randonnée. Avec un fort handicap : le premier tronçon de la voie verte ne suit pas la voie ferrée et préfère la poésie tranquille d'un chemin de halage. 

Bien sûr, il est possible de retrouver les traces de la voie unique comme vous pouvez le constater sur cette photo, mais, en vélo, certains tronçons relèvent vraiment de la pratique du VTT ! Desservie depuis Dinan en navette, la première gare, Le Hinglé, recevait des wagons citernes destinés à l'emplacement concédé d'un dépôt d'essence. 

Au-delà de Le Hinglé, le service a été abandonné dès 1964. C'est pourtant sur cette section que la voie verte retrouve l'emprise ferroviaire et franchit un premier passage à niveau.


Et nous arrivons à "Tréveron (Halte)" dont le BV est entouré de clôtures et d'un épais rideau de végétation. Impossible à photographier donc... Quels étaient les courants de trafic qui ont justifié la desserte de cet établissement  depuis Dinan jusqu'en 1964 ? Tréveron ne comportait pas de halle et l'emprise de son faisceau de voies est actuellement entièrement occupée par une zone pavillonnaire. 


Au-delà de Tréveron, nous empruntons l'ancienne section de voie unique fermée depuis les années 1950. C'est vieux... c'est loin ! Et pourtant, on y découvre des vestiges intéressants, comme ce bâtiment de garde de PN dont l'aspect général est préservé 






A 3 km de Tréveron, nous arrivons dans un petit établissement qui n'est pas une halte, mais un "arrêt" - puisqu'il figurait dans les colonnes de l'indicateur Chaix sous le nom de "St André - St Juvat (arrêt)". C'est aussi le PN38 de la ligne. Après une si longue période sans circulation ferroviaire, on ne peut qu'être admiratif sur l'excellence de l'état du bâtiment, devenu gîte ou résidence de vacances ! 
L'histoire du nom de cet arrêt mérite d'être contée : à l'origine, il s'appelle "Saint-André-des-Eaux"... Protestation de la Compagnie d'Orléans (le P.O) qui possède déjà une gare portant ce nom entre Saint-Nazaire et Le Croisic ! Le risque est grand de voir un receveur à son guichet se tromper dans la taxation d'un billet. Sans parler des erreurs d'acheminements de colis ou bagages accompagnés... Une entente fut trouvée au bénéfice de l'antériorité : le P.O conserva donc son "Saint-André-des-Eaux" et celui de l'Etat fut rebaptisé "St André - St Juvat (arrêt)" !





Deux  kilomètres à pédaler et l'on franchit ce pont métallique. Les ouvrages d'art sont rares sur ces petites lignes - par exemple, il n'y a pas de tunnel. En conséquence, pour parcourir ce paysage très vallonné, le profil est sévère, la ligne comportant des rampes de 20 °/°° sur des  sections que les jambes d'un cycliste amateur trouvent bien longues ! 







Le Quiou-Evran. Lorsque la ligne est coupée en deux, c'est ici le terminus de la section sud, déclassée en 1992. Le BV est fort bien préservé, tout comme la halle et le quai haut. Au fond de la cour de débord, une estacade permettait de transborder la chaux, extraite dans de nombreuses carrières. Quelques mètres de voie montée avec des rails à double champignon dissymétrique sont également exposés.


D'autres vestiges figurent aussi : le PK 430 ou encore, ci-dessus, la plaque protégeant le bac récepteur d'écoulement de la grue hydraulique. Après de longues manœuvres dans les gares intermédiaires, il fallait bien que les locomotives à vapeur "fassent" de l'eau : 3-230 D, 3-230 G (Ouest, rien à voir avec celles du P.O), puis 3-140 H, 3-140 C et enfin 3-141 C qui ont laissé place, à la fin, aux BB 63400 et 63500, puis aux Y 8000.

Dans cette gare de Le Quiou-Evran, de nombreuses pancartes didactiques expliquent maints détails du chemin de fer d'autrefois. On retrouve d'ailleurs ces pancartes tout au long de la ligne. On apprend ainsi que la gare du Quiou expédiait de la chaux, du bois de chauffage, du gui pour les fêtes de Noël, des pommes à cidre et des bestiaux. A l'arrivée, foin, paille, engrais agricole et matériaux de construction. 



A quelques kilomètres au sud du Quiou, la voie verte longe cette ancienne carrière à chaux. Mais un peu plus loin, c'est une immense installation très moderne traitant le calcaire que l'on peut apercevoir à travers un rideau d'arbre. La chaux est aujourd'hui expédiée par la route. 










Fief des bouquinistes, Bécherel est le nom d'une petite cité d'Ille-et-Vilaine bien connue des amateurs de livres anciens et de vieux documents. Elle avait une gare, aujourd'hui sur la voie verte : Plouasne-Bécherel. Copie conforme de celle du Quiou, jusqu'à, autrefois, le même plan de voies ! 


Pas d'estacade à chaux à Plouasne-Bécherel. Par contre, les installations d'un centre collecteur ou/et distributeur de produits agricoles existent toujours et devaient travailler autrefois avec le chemin de fer. 

Dans la gare côté cour, à proximité immédiate du BV, cette bascule charretière est aujourd'hui en libre-service. Autrefois, son emploi devait probablement faire appel à un agent de la gare. 

Une autre installation ne manquera pas d'intéresser les modélistes. Aujourd'hui, c'est un hangar utilisé par la commune (voyez les barrières Vauban !). Mais à l'époque de la voie ferrée, le quai en pierre visible à droite se trouve le long d'une voie de service et sa hauteur est celle du plancher d'un wagon. C'est donc, l'un de ces hangars comme il en existe tant, à l'époque, dans les cours de débord, employés par des entreprises clientes du rail. En Bretagne, il s'agit souvent d'une petite coopérative agricole locale. L'originalité de l'installation photographiée ici, c'est que l'accès routier du hangar est disposé à la perpendiculaire, sur le côté du bâtiment. Son exploitation n'est donc pas "traversante" comme dans une halle, mais se fait à angle droit. Une disposition à retenir pour un modéliste dont le réseau est à l'étroit ! 



A la sortie de la gare de Plouasne, une maison de garde de PN montre une autre disposition peu reproduite en modéliste : l'accès à la cave de la maisonnette ! 




Mais cette fois, nous reprenons la voie verte pour 7 km en observant au passage cette maison de PN à pierres apparentes, typiquement Ouest.















Trois kilomètres avant Médréac, la voie verte s'arrête pour laisser place aux rails. Plus exactement à l'un des plus célèbres vélorails de l'Hexagone ! C'est peu dire que l'attraction a du succès : autrefois, le petit BV - semblable à ceux du Réseau Breton mais nous sommes bien sur une ancienne ligne SNCF ! - n'a jamais dû voir l'affluence que ce vélorail connaît aujourd'hui en juillet et août. Si pédaler sur les petites draisines ne manque pas d'amuser petits et grands, pour le ferroviphile, une visite à Médréac est du plus haut intérêt pour les pièces qui y sont préservées. Sur les photos, vous voyez, par exemple, un levier à crans, un ponceau installé à l'origine de la ligne ou encore un branchement simple (aiguille) en rails à double champignon avec une pointe de cœur montée à l'ancienne. 




Au-delà de Médréac, le vélorail descend vers le sud en direction de La Brohinière. Quant à la voie verte, elle prend un autre itinéraire (non ferroviaire) et devient "voie partagée", c'est-à-dire une fausse piste cyclable séparée en rien de la circulation automobile... Le vélorail s'arrêtant bien avant l'ancien raccordement avec l'artère Paris/ Brest, nous sommes partis à la recherche des premiers mètres de la ligne montant à Dinan. Les voici en photo ! 




Et c'est donc en gare de La Brohinière que nous terminons ce périple. 

Texte et photos : Jehan-Hubert Lavie

4 commentaires:

  1. Whouah, vraiment génial. Un superbe travail. Les photos sont belles et les différents bâtiments constituent de jolies sources d'inspiration, surtout si, comme moi, on habite dans cette région des bords de Rance.

    Encore bravo.

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  2. Bonjour magnifique reportage étant de Dinard quel plaisir de revoir tous ces endroits qui me manque tant a Paris

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  3. Merci beaucoup pour ce reportage sur une ancienne voie que je connais bien, car j'en suis quasi voisin... et je compte bien la reconstituer partiellement (un jour !) en HO.
    Juste quelques petites corrections :
    - à Dinan (Quévert pour être précis !), il subsiste encore une maison de garde barrière près du rond point dit de "l'Aublette"
    - c'est le village de TREVRON, et non TREVERON;
    - sauf erreur, la maison de PN évoquée comme placée après la gare de Plouasne est en fait juste à côté de la gare de Le Quiou-Evran (ou alors, il y en a une tout à fait identique, surtout au niveau des haies qui l'entoure !), ce qui en fait un site bien sympathique à reproduire en modélisme (gare, halle, PN...).
    Merci encore pour ces belles photos, la balade est très sympathique à faire à vélo.

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