Dimanche 16 juillet, jour de départ pour les grandes vacances de plusieurs Länder du nord de l'Allemagne. L'idéal jour J pour aller observer, en gare de Niebüll, l'exploitation des trains qui desservent l'île de Sylt !
Sylt, c'est un peu la Côte d'Azur allemande. C'est une destination balnéaire pour une clientèle très aisée et un point de rendez-vous estival pour les artistes et la très haute société d'outre-Rhin.
Située à proximité de la frontière danoise sur la côte ouest, c'est la plus grande île allemande de la mer du Nord : elle mesure 35 km du nord au sud et 13 km d'est en ouest. Mais surtout, depuis 1927, elle est rattachée à la terre ferme par le Hindenburgdamm - une digue sur laquelle est posée un chemin de fer à double voie. Pas de route... Bref : pour se rendre à Sylt, on doit obligatoirement prendre le train. Et les Allemands le prennent volontiers avec leurs automobiles, car l'idée du voyageur en train avec automobile accompagnée ne parait pas du tout ringarde au pays de Mercedes, Audi et BMW !
Un jour de pointe en milieu d'après-midi, le chargement des automobiles sur les trains pour Sylt n'est pas sans rappeler l'embarquement sur les ferries pour la Corse, dans les ports de Toulon, Nice ou Marseille : de longues files parallèles d'automobiles qui attendent patiemment l'instant où les agents de cour leur diront d'avancer. A Niebüll, les voyageurs sont principalement allemands avec quelques véhicules immatriculés au Danemark ou au Pays-Bas. La file d'attente débute dès la bretelle d'accès au terminal d'embarquement mais semble bien gérée.
Je note la présence de plusieurs photographes ferroviaires qui semble nullement étonner les cheminots. Nous sommes en Allemagne et, comme en Suisse, l'ami des chemins de fer armé de son appareil photo bénéficie d'une liberté dont il sait ne pas en abuser en ne s'aventurant pas en dehors des emprises accessibles au public.
Deux opérateurs se partagent le marché de ces trains auto. car la DB a maintenant un concurrent : Der blaue Autozug Sylt.de avec ses trains bleus remorqués par de modernes locomotives diesel Vectron.
Occupant les voies 9 et 11 du terminal, Autozug Sylt fait un carton sur internet avec un site remarquablement bien agencé, expliquant que la durée du trajet de Niebüll à Westerland (le terminus dans l'île) est d'environ 35 minutes. Autant dire qu'aujourd'hui, le voyageur va avoir du spectacle sur la digue : le vent est déchaîné, les vagues aussi et le ciel alterne entre un étonnant soleil donnant une douce lumière et d'épais nuages noirs déversant des torrents de pluie !
Une pancarte indique que les voyageurs ayant réservé un billet en ligne recevront un bon d'achat Amazon.de de 10 € en cas de retard égal ou supérieur à 30 minutes !
Ces trains auto. ont une particularité : les occupants des automobiles peuvent rester à l'intérieur de leur voiture ! Cela pourrait faire un sujet de photographies hilarantes : un couple d'un certain âge avec monsieur, l'air sérieux, les mains sur le volant de sa Porsche, mais l'auto a été chargée en marche arrière. Un peu plus loin, c'est une joyeuse famille en camping-car (oui, il y a des camping-cars mais aussi des caravanes!) dont un bambin fait semblant de tenir le volant. Et là, c'est une famille dont tous les membres sont assoupis, peut-être à la suite d'un long parcours routier d'approche.
Les trains sont très longs puisque le profil du trajet est relativement plat. Les wagons qui les composent sont de types très variés. Certains semblent spécialement conçus pour ces navettes. D'autres sont de classiques wagons porte-autos dont bon nombre à deux niveaux. Nous sommes un jour de pointe et je n'en tire aucune conclusion car trains supplémentaires et forcements doivent être de mise.
Autozug-Sylt.de annonce un départ de ses navettes toutes les 60 à 90 minutes du matin au soir. La Deutsche Bahn doit faire aussi bien. Et en ce jour de pointe, départs et arrivées se succèdent à un rythme effréné. Le spectacle que j'observe est une vraie grande leçon d'exploitation : évolution des rames, remises en tête des machines, toutes ces opérations se font avec la régularité d'une métronome ! Or les installations de la gare de Niebüll sont loin d'être de première jeunesse avec une floraison de sémaphores et de signaux, tous mécaniques. Côté bâtiments, leur construction en brique me ramènent aux catalogues des maquettes Vollmer des années 1980. Et il est vrai qu'on verra bien le plan de voies de Niebüll comme projet de réseau du magazine Miba !
A côté de la double voie qui passent en gare de Niebüll pour aller vers l'Ouest à l'île de Sylt, une bifurcation part vers le nord avec une voie unique qui se dirige sur Tønder et le Danemark. Cette dernière destination est assurée par les autorails bleus (voir les photos ci-dessus) de l'opérateur Arriva qui est une filiale du groupe DB dont on peut observer le matériel automoteur du Danemark jusqu'aux Pays-Bas.
Sylt ne reçoit pas que des trains auto. La DB y envoie dessertes régionales et trains IC. Même la voiture "Bistro" passe sur l'île ! Pas de caténaire à Niebüll et l'ensemble du trafic relève donc de la traction diesel. La DB fait usage de modernes locomotives TRAXX, tout comme l'autre opérateur à la jolie livrée turquoise : NAH - Schleswig-Holstein.
La gare de Niebüll voit passer aussi une autre composition "culte" chez les amateurs que nous observerons une autre fois : les voitures IC venant de Cologne à destination du môle de Dagebull qui sont pris en charge par un autorail, la rame comportant un petit fourgon générateur l'autorail ne pouvant alimenter la "clim" des voitures IC !
Finalement, tous ces flux induisent des mouvements quasi-permanents de convois qui font que le passage à niveau (voir photo du haut) à commande par manivelles depuis le poste d'aiguillages et de signalisation reste fermé de très longues périodes !
Observant les photographes ferroviaires, je note que Vectron, TRAXX et autres engins modernes ne semblent pas leurs sujets favoris. Ce sont bien les bonnes vieilles diesel 218 qui sont l'objet de leur intérêt ! Contemporaines de nos BB 67000, ces 218 de la DB sont, ici, en excellent état de présentation : caisse propre, pas de peinture écaillée...
Finalement, ma dernière vision de Niebüll sera pour cette 218 dont la jeune agent de conduite, penchée à sa fenêtre, observe le refoulement prudent de sa longue rame de wagons à deux niveaux.
Texte et ensemble des photos : Jehan-Hubert LAVIE
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