dimanche 22 mars 2020

Le mystérieux fourgon du TGV jamais réalisé

Le TGV des Sables sur le pont de la Vendée à Nantes (c/E. Hospital)

Comme Ferrovissime est rédigé en télétravail depuis sept ans, la période actuelle n'est pas un frein à la réalisation du prochain n°105 daté de mai/juin 2020. Si je ne vous dévoile pas encore le titre d'un article qui réjouira les vaporistes, par contre, je ne résiste pas au plaisir de vous dévoiler un sujet qui a ravivé des souvenirs parmi les membres de la rédaction du magazine. Ce sujet, le voici :

• Il y a tout juste 20 ans, le TGV Atlantique desservait Les Sables d'Olonne en étant remorqué par une locomotive diesel depuis Nantes.

Un épisode, certes, éphémère dans l'histoire du TGV, la ligne des Sables ayant été électrifiée par la suite. Mais cette digression technique est, d'une part intéressante par son originalité, d'autre part, elle ne manquera pas de retenir l'attention des modélistes qui pourront ainsi faire rouler un TGV Atlantique (il existe en H0 et en N) sur un réseau sans caténaire derrière une CC 72000 (disponible aussi en H0 et N). Point très important, l'article de Ferrovissime est écrit par Eric Hospital, qui était Chef du PC de Nantes et c'est donc le récit de l'ancien responsable régional des circulations que nous allons vous donner à lire. Et puis, Eric est aussi un excellent photographe...

La relecture du papier d'Eric m'a rappelé de vieux souvenirs que ceux qui ont suivi la gestation du "système TGV" dans les années 1970 n'ont peut-être pas oublié : souvenez-vous, à l'origine, il n'est question que d'une ligne à grande vitesse Paris/ Lyon, d'abord envisagée avec des rames à turbines (d'où le prototype à turbine TGV 001 avec deux zéros pour ne pas le confondre avec Patrick, TGV 01!). Puis, l'électrification de la ligne à grande vitesse est logiquement décidée. Par contre, on prévoit de prolonger certaines relations sur Grenoble qui, faute de caténaire à l'époque, auront, pense-t-on alors, des rames équipées de turbines. Où trouvera-t-on la place de caser les turbines sur les engins ? La presse spécialisée de l'époque n'est pas très bavarde sur le sujet... peut-être parce qu'elle se doute déjà que le projet tombera à l'eau au profit de la traction électrique plus rationnelle !

J'oublie cette histoire jusqu'en 2010, quand Alstom invite la presse aux essais aérodynamiques de Regiolis dans la soufflerie du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment à Nantes. Au cours de ce colloque, François Lacôte, Directeur technique d'Alstom et ancien responsable du programme TGV A à la SNCF, évoque l'épopée du TGV. Il dit deux mots sur les TGV de Grenoble qu'on envisage, à l'origine, avec de drôles de fourgons à turbine. Je n'imagine pas alors à quoi aurait pu ressembler de tels véhicules.

Ce n'est que six ans plus tard que ma curiosité est satisfaite : le 8 septembre 2016 s'ouvre au Louvre, au Musée des arts décoratifs, l'exposition "Roger Tallon, le design en mouvement". Créateur de nombreuses oeuvres de design dans plusieurs domaines, Roger Tallon est l'auteur de la livrée Corail et du design du TGV Atlantique. Or, dans une salle présentant des maquettes ferroviaires, mon regard est attiré par une sorte de fourgon en livrée PSE orange (qui avait été créée par Jack Cooper). Une étiquette indique "Générateur". Présentant une esthétique en harmonie avec le TGV PSE, ce générateur est sous vitrine difficilement photographiable... et puis sortir un appareil photo au Louvre exige un accord préalable !

Dès que les circonstances le permettront, je ne manquerai pas d'enquêter sur ce mystérieux générateur. Mais en attendant, le mot de la fin revient à mon collègue Frédéric Didelot qui me fait remarquer, photo à l'appui, que ce drôle de fourgon, les Espagnols l'ont fait ! En 2012, la RENFE désirait engager  des AVE entre Madrid et La Corogne en Galice en empruntant une section de ligne non électrifiée. Talgo-Bombardier a donc conçu la série 730, des AVE hybrides électriques (25kV/3000 V) - diesel à écartement variable (voie normale/voie ibérique). Encadrant les neuf remorques Talgo intermédiaires, les deux motrices extrêmes purement électriques se voient doter, côté rame, d'un fourgon générateur diesel fournissant l'énergie nécessaire quand la caténaire est absente. L'AVE 730 roule à 250 km/h sous 25 kV sur ligne à grande vitesse et à 180 km/h en traction diesel sur écartement ibérique. Et si, plus tard, la ligne de Galice est électrifiée, il sera alors possible de supprimer les générateurs, les rames 730 circulant alors en pures électriques.

Jehan-Hubert Lavie

Le générateur est très visible derrière la motrice de tête sur cet AVE 730 (c/F. Didelot)


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